RDC : HWR exige une enquête impartiale sur la répression des adeptes de BDK en 24 avril 2020

RDC : HWR exige une enquête impartiale sur la répression des adeptes de BDK en 24 avril 2020

20 mai 2020 0 Par Rédaction

Selon l’Ong Human Rights Watch (HRW), au moins 55 personnes auraient été tuées au Kongo Central et à Kinshasa, lors d’une répression qu’elle qualifie de « sanglante » contre les adeptes du mouvement religieux Bundu dia Kongo (BDK) pris d’     assaut par les éléments de la Police nationale congolaise, le 24 avril 2020, dans la résidence de leur leader, Ne Muanda Nsemi.

Dans un rapport publié, mardi 19 mai 2020 à Kinshasa, l’Ong affirme que la police de la République démocratique du Congo a eu recours à plusieurs reprises à une force létale excessive contre un « mouvement religieux séparatiste » en avril 2020, tuant au moins 55 personnes et en blessant de nombreuses autres.

La répression par le gouvernement du mouvement Bundu dia Kongo (BDK) a eu lieu du 13 au 24 avril dans plusieurs villes de la province occidentale du Kongo Central, ainsi que dans la capitale du pays, Kinshasa, rapporte HRW qui précise que c’est un appel du chef spirituel du BDK, Ne Muanda Nsemi lancé à ses partisans pour qu’ils « chassent » de la province les personnes n’appartenant pas à cette ethnie, majoritaire au Kongo Central, qui a provoqué la réaction du gouvernement.

« Une opération policière effectuée le 22 avril contre le mouvement dans la ville de Songololo a fait 15 morts, et une autre, menée le 24 avril contre la résidence de Nsemi à Kinshasa, a fait au moins 33 morts », indique cette Ong internationale de défense des droits de l’Homme.

La police prend d’assaut la résidence de Ne Muanda Nsemi, où plus de 200 partisans du BDK s’étaient rassemblés, à Kinshasa, en République démocratique du Congo, le 24 avril 2020.
 Source : Capture d’écran tirée d’une vidéo que Human Rights Watch a reçue de sources via WhatsApp

L’usage de la force

D’après le directeur pour l’Afrique centrale à Human Rights Watch, Lewis Mudge, « les autorités congolaises se devaient de répondre aux messages du mouvement Bundu dia Kongo, qui incitaient à la haine ethnique ». « Mais, poursuit-il, le gouvernement a répondu en violant les normes internationales relatives à l’usage de la force, provoquant un bain de sang ».

Le 12 avril, rapporte HRW, Zacharie Badiengila dit Ne Muanda Nsemi, ancien député et président auto-proclamé de la « République fédérale du Kongo Central », a publié son bulletin d’information intitulé « Kongo Dieto (Notre Kongo en kikongo)» et destiné à ses adeptes. L’Ong relève que dans ce document de quatre pages, le leader de BDK exhortait ses partisans à se lever et chasser « tout Muluba, tout Mungala et tout Muswahili [personnes appartenant à d’autres groupes ethniques] » de la province du Kongo Central et à être « impitoyables » à leur égard.

Les tensions ont monté entre le 13 et le 15 avril, alors que des centaines de membres du BDK érigeaient des barrages routiers dans les villes de Boma, Kisantu, Sona-Bata, Lemba et Songololo, scandant des slogans d’exclusion ethnique et menaçant les « non-originaires ». « Certains étaient munis de longs bâtons et de noix de palme tandis que quelques-uns étaient armés de fusils de fabrication locale », souligne le rapport. Et de constater que les forces de police, déployées pour disperser ces attroupements, ont parfois tiré à balles réelles.

« Selon des témoins et des informations fournies par la police, ainsi que d’autres sources, au moins six membres du BDK et un passant ont été tuées dans les villes de Kisantu, Sona-Bata et Boma. Un membre du BDK aurait tué par balles un agent de police à Kisantu le 13 avril », rapporte HRW.

Le rapport indique également que, le 22 avril 2020 avant l’aube, la police a encerclé une maison à Songololo, où des dizaines de membres du BDK, dont des femmes et des enfants, s’étaient rassemblés pour préparer des manifestations. « Vers 3h00 du matin, les policiers ont ouvert le feu sans discernement sur la maison, l’ont incendiée, puis ont abattu ou assené de coups les personnes qui, prises de panique, se précipitaient dehors, en tuant au moins 15 et en blessant de nombreuses autres », affirme Human Rights Watch.

Le 24 avril, alors que les négociations avaient échoué, la police a pris d’assaut la résidence, où plus de 200 partisans du BDK s’étaient rassemblés, pour y arrêter Nsemi. Des tirs nourris ont été entendus dans tout le quartier pendant l’opération de police.

Nécessité d’une enquête impartiale

Le ministre de l’Intérieur Gilbert Kankonde a affirmé, dans une déclaration aux médias, que lors de l’assaut du 24 avril, 8 personnes avaient été tuées et 43 autres blessées, dont 8 agents de police.

Cependant, HRW dit avoir établi qu’« au moins 33 membres du BDK ont été tués. Près de 200 membres du BDK, dont des enfants, ont été brièvement placés en garde à vue, avant d’être transportés en bus vers leurs villes et villages au Kongo Central. Quarante-sept autres sont actuellement en prison sous les chefs d’accusations de +participation à un mouvement insurrectionnel, rébellion, détention illégale d’armes de guerre et incitation à la haine tribale+ ».

Il sied de rappeler que Ne Muanda Nsemi est actuellement détenu au Centre Neuro-Psycho-Pathologique de Kinshasa, après un diagnostic de trouble mental « sur fond de stress à répétition » constaté par les médecins le 30 avril.

« Le gouvernement devrait faire toute la lumière sur ces violentes opérations policières et faire rendre des comptes aux auteurs d’exactions, quel que soit leur grade », a affirmé Lewis Mudge. Et d’ajouter, « c’est le seul moyen pour les autorités de signaler de manière claire que les abus et l’usage excessif de la force ne seront pas tolérés »

Par Stanislas Ntambwe