RDC : le mythe de l’indépendance
28 juin 2020Le 30 juin 1960, la République Démocratique du Congo (RDC) devenait officiellement indépendant après avoir subi le règne de Léopold II (de 1885 à 1908) et la colonisation par l’Etat belge (de 1908 à 1960). 60 ans après, ce pays-continent est classé parmi les « Pays pauvres très endettés » (PPTE) alors qu’ il dispose des ressources naturelles qu’humaines colossales pour bâtir un pays prospère.
L’espoir suscité par l’ indépendance du Congo a été cruellement déçu. » Débout Congolais » , hymne au contenu qui motive le peuple à participer à son envol , à savoir : » bâtir un pays plus beau qu’avant, dans la paix » reste un mythe: les transformations structurelles internes attendues n’ont pas eu lieu et, à l’extérieur, sur la scène internationale, la RDC est dominée.
60 ans après l ‘indépendance, la RDC ne décide toujours pas librement de sa propre politique économique et sociale puisqu’elle reste soumise aux nombreuses ingérences étrangères visant l’accaparement de ses énormes ressources naturelles.
La RDC cultive le paradoxe d’être tout à la fois un pays riche de son sous-sol qui regorge de minerais rares (or, uranium, coltan, cassitérite, cuivre, cobalt, argent, diamant, pétrole, gaz…) et extrêmement pauvre parce que, à aucun moment de son histoire, il n’eut le contrôle de ses richesses et de leur exploitation qui commença sous Léopold II, roi des Belges, brutal propriétaire du pays à partir de 1885.
PAYS CONVOITÉ ET ATOMISÉ
Toutes les tragédies de la RDC se déclinent sur ce paradigme qu’est la convoitise de ses ressources naturelles.
Elle a toujours été un objet de prédation pour les grandes puissances du monde , désignées aujourd’hui sous l’appellation fallacieuse de « Communauté internationale« . La RDC est le théâtre africain de leur affrontement.
Lors de l’indépendance , en 1960 , les Belges laissaient une colonie sans cadres locaux pour diriger le pays, des structures étatiques inexistantes et des richesses naturelles immenses dont il importait de conserver l’usage et le bénéfice. C’est ce qui explique pourquoi la RDC a été si facilement placée sous tutelle des Etats-Unis et de l’Europe, politiquement et économiquement.
Les deux guerres du Congo (1996/1997 et 1998/2002) et la crise des Grands Lacs ont révélé de nouvelles puissances régionales qui se sont entendues pour en exploiter les richesses, devenues l’enjeu principal des conflits. Le pillage systématique des mines et des forêts a permis le financement des conflits et le trafic d’armes.
Le délitement de l’Etat congolais a conduit la » Communauté internationale » a y intervenir directement , depuis 2002 , sans mettre fin à la mise en coupe réglée de la RDC, via le Rwanda et l’Ouganda, dont au final, elle est le plus grand bénéficiaire.
L’implication des Occidentaux , sous couvert de l’ONU et des Institutions financières, souffre d’une étrange schizophrénie. D’un côté, la » Communauté internationale » a financé un processus de transition politique vers la démocratie en s’efforçant de ramener la stabilité dans ce vaste pays où se trouve déployé le plus fort contingent onusien au monde; de l’autre, elle donne réalité à une sorte de « marché commun » régional dominé par le Rwanda, pourtant premier responsable de l’instabilité de la région du Kivu, et refuse au Congo l’édification d’un Etat puissant et armé face aux défis de la paix et de la reconstruction comme s’il présentait un danger pour la position dominante des compagnies majors occidentales dans l’exploitation économique de la RDC.
Ce positionnement d’équilibriste qui consiste à atomiser la RDC en confiant le leadership économique et politique de la région des Grands Lacs au Rwanda au détriment du Congo producteur des richesses rend, selon la formule de Pierre Hassner, spécialiste français des relations internationales, » la paix un peu moins impossible mais la guerre un peu moins improbable « .
Aujourd’hui, la rivalité opposant les Occidentaux à la Chine pour l’exploitation des richesses naturelles que possède la RDC n’est pas faite pour arranger les choses. Tout est sous contrôle de l’étranger.
La conclusion à la quelle souscrivent les Congolais, qui débattent souvent de cette situation, est que la RDC doit sortir de l’emprise occidentale qui constitue, en vérité, un frein à son envol. Sinon l’indépendance, comme moyen de libération de l’Homme, restera à jamais un mythe.
Cette libération, qui n’exclut pas la coopération ou des rapprochements avec d’autres Etats du monde, doit être porteuse de changements socio-économiques, juridiques et politiques pour le développement de la RDC.
Il est temps pour les Congolais de prendre leur destin en main et accomplir la mission sacrée de reconstruire ce vaste pays au cœur de l’Afrique. L’avenir de leurs enfants en dépend.
Pierre Despa
L’INDÉPENDANCE DEVIENT UN MYTHE LORSQUE QUE LES ÉLITES SONT INCONSCIENTES DE SON IMPORTANCE AINSI DE LA MANIÈRE DE L’ASSUMER ET DE LA VIVRE.
Au bout de quatre siècles de destruction esclavagiste et plus 80 ans de colonisation, on demande aux Congolais de construire en 60 ans, avec tous les obstacles néo-coloniaux, un État plus prospère que l’État colonisateur. C’est insensé de parler de mythe de l’indépendance. De quelle indépendance s’agit-il ?
Le Kongo doit travailler en se fondant sur la chronologie longue.
C’est avec les mêmes ressources naturelles qui fait parler du « mythe » de l’indépendance que Léopold II fut faillite. Qui a parlé du mythe de civilisation ?
1 – L’indépendance est un mythe pour ceux qui n’ont jamais oeuvré pour son obtention.
2 – L’indépendance est un mythe pour ceux qui confondent l’indépendance est la démocratisation de la consommation de masse.
3 – L’indépendance est un mythe lorsque ceux qui sont chargés de l’assumer pour l’intérêt de leur peuple ne poursuivent pas effectivement ce but.
4 – L’indépendance ne s’assume pas spontanément : elle résulte des luttes continuent pour l’instauration et l’institution des valeurs de liberté, de solidarité et de partage.
5 – L’indépendance n’est pas une litanie mais une conscience historique et un mode de vie
6 – L’indépendance ne s’exerce pas par le pouvoir politique mais dans la manière dont chacun citoyen conscient assume ses responsabilités au sein de la société.