RDC : des opérateurs politiques et économiques dans le viseur de la justice

RDC : des opérateurs politiques et économiques dans le viseur de la justice

10 août 2020 0 Par Rédaction

Les Congolais s’apprêtent à vivre dans les jours qui viennent, des procès, mais aussi des arrestations semblables à ceux liés au programme d’urgence de 100 jours du Chef de l’État.

Cette fois-ci, il s’agira des hommes et femmes d’affaires, bénéficiaires des exonérations et compensations frauduleuses. Oui, le Chef de l’État l’a si bien compris. Les finances publiques saignent lamentablement. Voilà qui justifie la nomination d’un nouvel inspecteur principal des Finances chef des services, Jules Alingete, à la tête de l’inspection générale des finances (IGF).

Il convient d’indiquer de prime à bord, que l’IGF est une structure qui contrôle les finances publiques, du gouvernement et des provinces. Elle dépend directement de la Présidence de la République. A ne pas confondre avec la Cour des comptes, ce tigre en carton dont les magistrats n’ont jamais prêté serment au Parlement depuis qu’ils sont nommés, il y a des années. Ce qui fait que cette Cour des comptes ne sait exercer son travail. Dieu seul sait pourquoi les Magistrats de cette Cour ne sont pas assermentés.

A peine installé, Jules Alingete à la tête de l’IGF, a pris courageusement des décisions d’examiner toutes les exonérations qui font perdre au Trésor public plusieurs milliards de dollars.

« Suite aux instructions de Monsieur le Président de la République ainsi qu’aux décisions du gouvernement en rapport avec le contrôle des exonérations, l’inspection générale des finances informe les bénéficiaires d’avantages fiscaux, douaniers ou autres, sous quelque régime que ce soit, qu’elle débute ce jour l’examen de la régularité et de la pertinence de ces régimes particuliers, sur base des dossiers qui lui ont été transmis par les autorités gouvernementales compétentes pour les accorder« , annonçait l’IGF dans un communiqué, il y a quelques jours .

« En conséquence , tout dossier d’exonération qui ne sera pas transmis par cette dernière et toute utilisation auprès d’une administration financière, d’un acte non communiqué par l’autorité émettrice, sera assimilée à un cas de fraude « , précisait le communiqué signé par Jules Alingete.

L’amertume

Le constat des experts en matière des finances publiques est amer. Les exonérations et les compensations des recettes publiques, est une nouvelle forme de détournement des deniers publics.

Le patron de l’IGF l’a révélé lors de sa communication à la Fédération des entreprises du Congo (FEC), mercredi 06 août 2020. L’inspecteur général des finances indiquait que le pays perd 5 milliards de USD par an pour des exonérations dont 60 % sont sans fondement.

Une source de la commission d’examen des exonérations qui travaille à l’inspection générale des finances révèle que la situation est inacceptable et des mesures draconiennes seront proposées au Chef de l’État.

Pour cette dernière source, l’inspection générale des finances entend endiguer cette hémorragie en proposant que, toute nouvelle exonération à accorder soit soumise à l’examen du Conseil des ministres pour éviter les abus actuels qui rongent les finances publiques.

Les finances publiques saignent

Un expert ayant requis l’anonymat à l’IGF estime tristement que, la pratique de compensation constitue un très mortel cancer dans les finances publiques et est source de paiements de fausses dépenses.

« Plusieurs personnes ont utilisé cette pratique de compensation pour appauvrir l’État avec des fausses créances comme des marchés non exécutés « , affirme la même source à Madi@Plus.

Et une autre source de marteler : « Si la mesure d’interdiction des compensations tient, nous allons assister à l’amélioration des recettes et à la chute des prédateurs des finances publiques qui se présentent souvent en donateurs« .

Pour Godé Mpoyi, président de l’Assemblée provinciale de Kinshasa et expert en économie, l’IGF doit relever le défis, car les fossoyeurs des finances s’activent déjà à monter des complots contre les Inspecteurs des finances. Les menaces de mort contre Jules Alingete sont à prendre au sérieux. Pour éviter l’irréparable, la Présidence a ajouté bon nombre de militaires à sa garde.

Par ailleurs, une source crédible de la Présidence de la République, explique à Médi@Plus que, l’Inspection générale des finances a fini l’examen de certains dossiers. Parmi ceux-ci se trouvent : la gestion des fonds alloués à la Covid-19 par le ministre de la santé; la surveillance du compte général du trésor public; la destination réelle de 35 millions USD de la caution judiciaire payée par Rawbank, dans le cadre du procès Samibo.

En rapport avec cette caution de 35 millions de dollars, cette source révèle que des personnalités sont citées dans cette affaire. La somme versée par Rawbank s’est volatilisée sans laisser des traces. Une autre source affirme que des réquisitions ont été déjà déposées chez certains responsables de la Banque centrale du Congo (BCC).

Mais, il y a encore le dossier de l’utilisation des reliquats de la paie des fonctionnaires. Pire encore, beaucoup de maisons de l’État sont devenues propriétés des dignitaires de l’ancien régime. Plusieurs anciens ministres et autres autorités urbaines anciennes et actuelles sont concernés. Ces derniers exerceraient de fortes pressions sur les enquêteurs pour qu’ils arrêtent l’opération de contrôle.

Qui vivra verra !

Une autre source à l’IGF révèle que les conclusions de toutes ces missions pourront être rendues publiques. Certaines langues parlent d’un point de presse à l’IGF, mardi 11 août 2020, pour rendre publique la liste des personnalités qui bénéficient frauduleusement des exonérations et compensations, faisant perdre au pays 5 milliards de dollars par an.

Une autre source estime à plus de mille exonérations non conformes. Les enquêtes illustrent qu’une opératrice congolaise détiendrait à elle seule 83 exonérations. Cette dernière fait entrer tous ses produits, marchandises de tout genre sans rien payer à l’État.

Jusque là, le travail que fait l’IGF est apprécié de tous. Pourtant, l’importance de cette inspection n’était pas connue du grand public depuis toujours, en dehors de la révélation des 15 millions de dollars des pétroliers détournés. Elle était réduite à sa simple expression.

Au regard de toutes ces révélations, les Congolais espèrent que beaucoup d’opérateurs économiques assimilés aux vautours et fossoyeurs des finances de l’État soient traduits en justice, emprisonnés sans complaisance et l’argent de l’État récupéré.

Le Congo Kinshasa mérite un budget costaud à la dimension de ses richesses. Il faut pour cela, réexaminer toutes les exonérations et compensations accordées entre copains et copines. Le développement du pays est à ce prix.

Certains analystes expriment par ailleurs quelques inquiétudes concernant l’IGF, même si elle dépend directement de la Présidence de la République. Les agents doivent être surveillés pour éviter qu’ils ne tombent sur les pots de vin.

Par Bajika Ndeba