Silence, Kabila et Tshisekedi au point d’achèvement
14 septembre 2020La session parlementaire de septembre débute ce mardi 15 septembre 2020 à l’Hémicycle du Palais du peuple. Certains observateurs parlent d’une rentrée de tous les enjeux et de tous les dangers. Une peur tout à fait justifiée, vu les attitudes, gestes et propos des uns et des autres. L’implicite affole.
Pour en avoir le cœur net, il suffit de voir au-delà du rideau les deux rencontres tenues dimanche 13 septembre. Le Président de la « République de Kingakati » a réuni dans sa célèbre ferme ses lieutenants. Même si rien n’a filtré de cette messe, les fins limiers estiment qu’il s’agissait entre autres de peaufiner des stratégies pour amortir la fureur de l’allié.
Dans l’autre camp, l’autorité morale du CACH a, lui aussi, réuni tard la nuit ses proches à la Cité de l’Union africaine. Il faut préciser que ces réunions sont tenues la veille de la rentrée parlementaire. Les non-dits de la communication révèlent que les partenaires de la coalition au pouvoir ont pris très au sérieux les menaces qu’ils se profèrent par des personnes « satellites », ces communicateurs utilisés pour le besoin de la cause et qui apprennent sur le tas à communiquer.
En analysant froidement le climat au sein de la coalition, tous les signaux indiquent que quelque chose se prépare. La guerre est larvée, livrée par l’intermédiaire des acolytes. L’hypocrisie qui a toujours caractérisé les relations de deux partenaires peut éclater au grand jour un de ces quatre matins.
Au Front commun pour le Congo (FCC), les caciques misent sur leur majorité parlementaire pour mettre le Chef de l’État en accusation, pensent-ils, pour « haute trahison ». Théodore Ngoy ne racontait pas sa vie en parlant de violation de la Constitution par Félix Tshisekedi. Il n’a fait qu’inaugurer le rouleau compresseur inexorable du processus de destitution.
Sur ce point, les cadres du FCC sont divisés. Les modérés disent clairement que cette procédure est périlleuse et intenable dans le contexte actuel. Cependant, les plus radicaux et optimistes n’y voient aucun inconvénient et embûche. C’est la seule voie légale brandie pour évincer Tshisekedi qui « commence à gêner ».
A malin, malin et demi
Au CACH, ils se disent posséder quelques marges de manœuvre pour neutraliser le partenaire au passé « peccamineux ». Ils évoquent la dissolution du Parlement et peuvent coincer le FCC en retardant le remplacement de Tunda ya Kasende, le temps de régler le compte et accélérer certains dossiers judiciaires. Au niveau de la Cour constitutionnelle, Félix Tshisekedi semble avoir le contrôle. Ce qui amenuise les chances du projet de mise en accusation du Chef de l’État.
Qu’à cela ne tienne! Le vrai enjeu actuellement entre Tshisekedi et Kabila, c’est autour du contrôle de la Commission électorale nationale indépendante (CENI). Le Président de la République a gelé la dissolution du Parlement, parce que c’est la même CENI qui organiserait les élections dans les soixante jours qui suivent la dissolution. « Il faut temporiser, en attendant la réforme de la CENI », affirme un proche de l’Udps.
Le Candidat Ronsard Malonda (FCC) appartient déjà au passé. Les confessions religieuses s’activent à en désigner un autre. Entre temps, Sony Kafuta est éjecté de la présidence des Église de réveil du Congo (ERC). Tout était mis en œuvre pour son départ, lui qui soutenait Malonda Ronsard. Son remplaçant, prophète Dodo Kamba, est ce pasteur qui avait prophétisé la victoire de Félix Tshisekedi déjà en 2017.
Tout se joue à ce niveau-là. Même si la Conférence épiscopale nationale du Congo (Cénco) est inféodée à Lamuka, il faut gagner des membres devant désigner le prochain remplaçant de Corneille Naanga. Et Fatshi se bat sans relâche, en face du FCC qui tient à maintenir sa main mise sur la centrale électorale.
Au FCC comme au CACH, l’avenir de l’un comme de l’autre est subordonné par le fait de subjuguer la CENI. C’est ici qu’il faut de l’intelligence et de la finesse, car il s’agit de la survie politique. Le combat livré et perdu par Ruberwa contre Kankonde pour piloter le recensement de la population, en est un des signes avant-coureurs. Cette perte a poussé le FCC à sortir de sa réserve pour réclamer des discussions dans la nomination des animateurs de la territoriale. Le CACH signe et persiste : la territoriale a été et est l’apanage du Ministère de l’Intérieur et non de la Décentralisation.
Déjà au niveau des nominations territoriales, ça barde. La Kabilie, Majorité prédidebtielle (MP) à l’époque qui ne partageait ce privilège avec aucun de ses partenaires, réclame au CACH un large consensus avant de nommer.
Pour la survie de l’un comme de l’autre, la guerre entre Tshisekedi et Kabila se joue sur de petits détails. Elle s’apparente à un combat de boxe d’une dizaine de rounds. Ce dernier est méticuleux.
Par Bajika Ndeba